La magistrature et la relève
Point de vue de l’Honorable Paul Crampton

J’ai eu l’opportunité de profiter d’une visite à Montréal de l’Honorable Paul Crampton, juge en chef de la Cour fédérale, pour échanger avec ce dernier sur différents thèmes touchant la relève dans la profession.

Le juge Crampton a d’ailleurs fait preuve d’une grande générosité en acceptant de répondre sans détour et avec intérêt à toutes mes questions.
Comment l’évolution du rôle traditionnel de l’avocat influencera, selon vous, la pratique des avocats de la relève ?

Pour le juge Crampton, les enjeux liés à l’accès à la justice teinteront considérablement la façon de pratiquer le droit. Ainsi, ces enjeux « obligeront les jeunes avocats à acquérir ce que l’on appelle les compétences de justice participative afin de diminuer les coûts de même que les délais d’accès à la justice ».

On ne peut traiter de l’évolution du rôle traditionnel de l’avocat sans aborder l’aspect technologique. Le juge Crampton reconnait tous les avantages qui découlent de l’utilisation des nouvelles technologies mais, il invite les jeunes avocats à se conscientiser aux aspects plus négatifs.

En effet, le fait d’être « connecté » en tout temps entraîne certainement l’avantage de pouvoir plus facilement travailler à l’extérieur du bureau. « Il faut toutefois être en mesure d’établir des limites claires et de gérer les attentes des gens qui nous entourent afin de préserver un certain équilibre. Sans cette gestion des attentes, les collègues au cabinet ou les clients peuvent facilement s’attendre à ce qu’un jeune avocat réponde aux courriels presque tout de suite, même tard le soir ou pendant la fin de semaine ». Pour le juge Crampton, « il s’agit donc d’une zone difficile à naviguer qui relève de l’art plutôt que de la science ».

Il nomme également la grande disponibilité d’informations juridiques sur internet comme facteur à considérer dans l’évolution du rôle de l’avocat. Selon lui : « cette disponibilité exercera une plus grande pression qu’auparavant sur les avocats qui se lancent dans la profession puisqu’ils devront constamment trouver de nouvelles façons d’ajouter de la valeur à des prix de plus en plus bas sur le marché des services juridiques ».

Comment cette relève peut-elle se démarquer dans un milieu aussi compétitif que le milieu juridique ?

Le juge Crampton est convaincu qu’un avocat aura plus de chance de se démarquer s’il est créatif et passionné. Selon lui : « les clients aiment voir cela, jusqu’à un certain point, et ils sont typiquement impressionnés par les avocats créatifs ».

Il s’agit ensuite d’être proactif. « Il ne faut pas simplement se contenter de bien faire le travail demandé, il faut aller au-delà lorsque cela est approprié. Il faut rapidement apprendre à se mettre dans la peau du donneur d’ouvrage ».

Il faut également cultiver une façon intelligente de travailler. Pour le juge Crampton, cela passe notamment par le respect de saines habitudes de vie, lesquelles aident à maintenir un haut niveau d’efficacité mentale et de créativité.

Finalement, se mettre de l’avant par la rédaction d’articles et de conférences de même que le fait de s’impliquer auprès de diverses associations sont quelques exemples cités par le juge Crampton et qui permettent, selon lui, de se distinguer aux yeux de ses pairs.

Quels conseils donneriez-vous à un avocat qui débute sa pratique ?

Au-delà de la maîtrise des textes de lois et de la jurisprudence, le juge Crampton croit que les jeunes avocats devraient toujours garder en tête l’importance de « cultiver leur compréhension des principes de droit ainsi que leurs habiletés de raisonnement juridiques ».

Le juge Crampton termine en partageant un conseil précieux qu’il utilise lui-même quotidiennement. « Ne remettez jamais ce qui est important pour traiter ce qui ne l’est pas. La meilleure façon d’y arriver est sûrement de dresser une liste de priorités et de la respecter ! »

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